Transmettre son patrimoine à la prochaine génération, de son vivant : une bonne idée?

Au fond, pourquoi attendre de ne plus être là pour distribuer son héritage? Bonne question, mais qui appelle une réponse nuancée.

Les économistes estiment qu’avant la fin de la décennie, la génération du baby-boom aura transféré à la génération suivante des actifs d’environ un billion de dollars. Il s’agirait du transfert intergénérationnel de richesse le plus important de l’histoire du Canada.Si une grande portion de ce transfert se fait au profit des enfants après le décès des parents, de plus en plus de parents envisagent d’y procéder, du moins en partie, alors qu’ils sont encore bien portants.Pourquoi?

Deux bonnes raisons de le faire

Quelques raisons plaident en faveur d’un transfert de votre vivant.

  • C’est maintenant qu’ils en ont besoin
    Les chiffres montrent notamment que l’achat d’une première propriété est beaucoup plus difficile que par le passé. La hausse des coûts d’emprunt fait en sorte qu’un jeune ménage doit amasser une mise de fonds considérable s’il veut s’éviter des mensualités excessives.Dans le graphique suivant, l’indice d’accessibilité est calculé en fonction de la part de ses revenus qu’un ménage doit consacrer au logement : plus il est élevé, plus il est difficile d’accéder à la propriété.

  • Vous serez là pour les guider 
    Selon certains sondages, plusieurs parents craignent que leurs enfants ne disposent pas encore des connaissances financières nécessaires à la gestion de ce patrimoine. Si vous faites un transfert de votre vivant, vous serez là pour les épauler.

Deux bonnes raisons de ne pas le faire

À l’opposé, de bonnes raisons plaident contre un transfert de votre vivant.

  • Vous ne pouvez peut-être pas vous le permettre 
    Avec l’allongement de l’espérance de vie, les parents doivent s’en remettre à leur épargne beaucoup plus longtemps que par le passé, et les frais liés aux dernières années peuvent être plus lourds que prévu. Il n’est pas rare que ce soient les enfants qui, quand leurs parents atteignent un âge avancé, doivent leur apporter un soutien financier. Le transfert intergénérationnel est alors en sens inverse.
  • Ce n’est peut-être pas ce qu’ils attendent de vous 
    Plusieurs indices tendent à montrer que les jeunes générations ont une conception de la valeur différente de celle de leurs parents. Ils pourraient trouver plus important, par exemple, de pouvoir choisir eux-mêmes leurs lieux et conditions de travail, de monter des projets d’entreprise ou de gérer leur temps de façon enrichissante. Peut-être désirent-ils donc plutôt être épaulés dans ces projets.

Comment procéder

Il pourrait donc être important de discuter avec vos enfants, et avec votre conseiller, pour déterminer la stratégie la plus appropriée. Par la suite, si votre réflexion vous oriente vers un transfert de votre vivant, votre conseiller pourra explorer avec vous différentes façons de procéder.

  • Don en argent 
    Vous pouvez donner à vos enfants le montant en argent que vous voulez, par exemple pour effectuer une mise de fonds sur une propriété. Ce don ne sera pas imposable entre leurs mains. Cependant, sachez que si, pour avoir le comptant nécessaire, vous devez d’abord décaisser de votre régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou de votre fonds enregistré de revenu de retraite (FERR), vendre des placements non enregistrés ou racheter un contrat d’assurance, vous pourriez être imposé.
  • Don du CELI 
    Vous ne pouvez céder votre compte d’épargne libre d’impôt (CELI), ni cotiser au CELI de vos enfants. En revanche, vous pouvez retirer des fonds de votre CELI pour faire un don en argent, et ce retrait ne sera pas imposable. Si vous avez des sommes importantes dans votre CELI, c’est le moyen le plus fiscalement avantageux de dégager des sommes à transférer à vos enfants.
  • Mise en place d’une fiducie entre vifs 
    Une fiducie est une personne morale distincte de vous-même et de vos enfants qui repose sur trois piliers : le constituant, c’est-à-dire son créateur, qui y transfère des actifs ; le fiduciaire, qui en a le contrôle et gère l’actif ; et le bénéficiaire, qui est celui qui profitera des actifs. Une fiducie peut être testamentaire, c’est-à-dire créée au décès, ou non testamentaire, auquel cas on la dit « entre vifs ». C’est un outil de transfert et de fractionnement performant, mais coûteux et complexe, qui convient généralement à des actifs importants comme ceux d’un propriétaire d’entreprise, d’un professionnel fortuné ou d’un propriétaire de plusieurs immeubles locatifs.
  • Don d’une propriété 
    Si vous prenez la grosse décision de céder votre résidence principale à vos enfants pour aller vivre dans un autre logis, ce don ne sera pas imposable pour vous ni pour eux. Cependant, si vous leur cédez une résidence secondaire ou un immeuble locatif, vous devrez déclarer un gain en capital basé sur la juste valeur marchande de la propriété et payer l’impôt afférent.
  • Don au CELIAPP 
    Le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP) permet d’accumuler rapidement, à l’abri de l’impôt, des sommes destinées à l’achat d’une maison. Vous ne pouvez pas cotiser au CELIAPP de votre enfant, mais vous pouvez faire un don en argent à ce dernier pour qu’il fasse sa cotisation, laquelle lui procurera en outre une déduction d’impôt.
  • Don au REEE 
    Vous pouvez cotiser au régime enregistré d’épargne-études (REEE) de vos petits-enfants pour éviter à vos enfants d’avoir à le faire. Comme les fonds croîtront pendant des années à l’abri de l’impôt, c’est une forme de transfert intergénérationnel efficace qui profitera aux deux prochaines générations.
  • Don d’une assurance vie  
    Si vous possédez un contrat d’assurance vie, il est possible, sous certaines conditions, que vous puissiez transférer votre intérêt dans ce contrat à vos enfants ou petits-enfants, en franchise d’impôt. Les règles fiscales qui entourent ce type de transfert sont cependant complexes et vous devrez être bien conseillé.
  • Don du REER ou du FERR 
    Vous ne pouvez pas transférer votre REER ou votre FEER à vos enfants et ne pouvez pas cotiser à leur REER non plus. Vous devez d’abord faire un retrait, lequel sera imposable, puis leur faire un don en argent.

Comme on peut le voir, la question du transfert d’actifs du vivant de la personne comporte à la fois beaucoup de « pourquoi » et de « comment ». Assurez-vous d’être bien conseillé pour prendre les bonnes décisions.

Par |2024-01-17T09:34:04-05:0031 octobre 2023|Finances|
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